25 ans de Biovalais: «Le Valais est idéal pour l’agriculture biologique»

06. juin 2018

Dans le Bas-Valais, l’agriculture biologique se développe constamment que ce soit en arboriculture, viticulture, cultures de plantes aromatiques et médicinales ou encore en production ovine et caprine. Les activités sont coordonnées par Biovalais, l’organisation membre de Bio Suisse qui compte une centaine de productrices et producteurs bio et plus de 200 membres sympathisants. Jean-Yves Clavien et la collaboratrice Karine Contat expliquent, ce qui fait la différence en Valais.

Jean-Yves, cela fait 14 ans que tu es président – quelles sont les priorités de Biovalais?

Chaque secteur est représenté au Comité: aussi bien la viticulture, les plantes aromatiques, l’arboriculture et les cultures maraîchères ainsi que l’élevage ovin et caprin et la volaille. Le secteur laitier n’est que peu représenté, car il n’y a presque pas de laiterie bio en Bas-Valais. Nous nous concentrons davantage sur le lait de brebis et de chèvres. Ce qui est particulier ici en Valais, ce sont les parcelles en partie très morcelées. La conséquence est que nous vivons à proximité de paysannes et paysans non bio et que nous collaborons étroitement avec eux. Nous sommes ouverts aux échanges. Un thème important est par exemple la dérive des produits phytosanitaires chimiques de synthèse, interdits en bio.
Nous sommes actuellement très actifs dans le secteur de la viticulture. Une plateforme à orientation biologique pour les viticulteurs valaisans existe depuis l’année passée. La plateforme est gérée en commun par Biovalais et Vitival, l’association valaisanne des viticulteurs travaillant selon les méthodes de la production intégrée. À ce jour, il existe sept groupes de travail actifs, répartis entre Fully et Salquenen. Les viticultrices et viticulteurs bio et PER y partagent leurs expériences, par exemple sur la réduction des produits phytosanitaires, le travail du sol ou le désherbage. Il existe déjà quelques viticultrices et viticulteurs qui utilisent ponctuellement des techniques d’agriculture biologique malgré le fait que leur domaine ne soit pas certifié bio. Et l’intérêt augmente. L’année passée, 60 viticultrices et viticulteurs étaient intéressée, cette année, ils sont déjà 95!
Le Valais compte en tout dans les 600 viticultrices et viticulteurs professionnel-le-s – ce qui veut dire, qu’actuellement un sixième s’intéresse à l’agriculture biologique: certains envisagent de passer en bio, plusieurs sont déjà certifié-e-s Bourgeon, d’autres participent parce qu’ils veulent réduire leur utilisation de produits phytosanitaires chimiques de synthèse et souhaitent connaître les techniques adéquates comme par exemple l’installation de diffuseurs de phéromones qui permettent d’éviter que mâles et femelles d’une espèce d’insectes ne se rencontrent. Régulièrement, des nouveaux produits arrivent sur le marché. Les membres des groupes de travail réalisent aussi des essais puis échangent entre eux, de paysan à paysan.

Le Valais va-t-il à terme entièrement passer à la viticulture bio?

Nous n’y sommes pas encore. Le problème principal est le travail du sol. Dans bon nombre de petites parcelles, les mauvaises herbes représentent une importante concurrence pour l’eau et les éléments nutritifs. Le travail de ces sols est en plus difficile, particulièrement s’ils sont très en pente. Nous avons besoin de solutions pratiques et pas chères. Bien que le bio constitue une plus-value en viticulture, le point central est d’obtenir de bons vins. C’est différent en arboriculture, à l’exemple des pommes : ce n’est pas leur provenance valaisanne qui est appréciée en premier lieu mais qu’elles aient été produites biologiquement.
L’arboriculture bio valaisanne doit aussi poursuivre son développement. Nous produisons en Valais plus de la moitié des fruits de tables suisses; une vingtaine d’arboricultrices et d’arboriculteurs produisent 95 pourcents des fruits bio valaisans. En arboriculture, l’intérêt d’avoir d’autres producteurs bio est toutefois moins marqué qu’en viticulture. On craint une baisse des prix, si l’offre devait trop augmenter. Mais les conditions valaisannes sont idéales pour la production bio. Nous avons des avantages climatiques, le climat est plus sec qu’en Suisse allemande et certaines maladies des plantes sont par conséquent moins présentes. Si nous ne passons pas au bio, ce sont les Thurgoviens qui le feront – du reste, le cercle arbo bio de Suisse orientale nous rendra bientôt visite pour un échange!
Personnellement, je suis actif dans la transformation de fruits avec l’entreprise familiale Frutonic. Mon grand-père a créé l’entreprise en 1928, puis mon père a repris le flambeau. L’idée d’origine était de faire quelque chose contre les surplus de tomates et d’abricots. Aujourd’hui, je transforme principalement des abricots, des pommes, des poires Williams et des fraises en jus et purées de fruits. Toutefois, la part du bio se trouve actuellement que dans les dix pourcents parce que les matières premières disponibles sont insuffisantes.

Karine, comment se passe la collaboration avec l’Oberwalliser Biovereinigung?

Les structures sont différentes dans le Haut-Valais: leurs productions principales sont la production laitière ainsi que la production ovine et caprine; il y a aussi des cultures de céréales et d’arboriculture mais de petites ampleurs. Nous collaborons autant que possible, actuellement surtout dans les secteurs ovins et caprins. Là, nous souhaitons prochainement lancer un sondage sur la commercialisation. Nous posons des questions sur la part de la vente directe et sur leur intérêt à mettre en place une filière avec les grands distributeurs. Nous planifions également une soirée d’information en commun au Centre agricole de Viège, qui fonctionne comme centre de compétence pour les petits ruminants et collabore aussi avec le FiBL. Nous coopérons également pour des prises de positions et assurons des présentations communes. Nous étions par exemple présents à la foire Bio-Agri avec un stand en commun.

Biovalais a été fondé 1993, qu’est-ce qui a changé depuis lors?

Tandis que nous étions les premiers temps livrés à nous-mêmes, le canton montre maintenant un intérêt accru pour nos activités. Nous avons depuis peu un mandat de prestations de trois ans pour renforcer la coordination entre le Bas et le Haut-Valais dans le secteur bio et pour défendre les intérêts du Valais en agriculture biologique au niveau national. Je m’occupe de ce mandat dans le cadre d’un petit temps partiel. Un objectif est, entre autres, d’encourager les cultures d’anciennes céréales et de développer une filière. À cet effet, nous sommes déjà en discussion avec des productrices et producteurs ainsi que des boulangers. Mais le projet n’est encore que dans ses tout débuts.

Quelle est votre vision pour les cinq à sept années à venir?

Développer le Valais, Pays Bio! En production végétale mais aussi en production animale. Les conditions climatiques y sont favorables, mais il faut aussi poursuivre le développement des canaux de commercialisation: nous ne devons pas seulement persuader des productrices et producteurs de se reconvertir au bio mais également développer le marché en parallèle. On le voit en arboriculture: là, ce n’est pas la technique qui pose problème mais l’écoulement – la question du marché est prioritaire. Le développement du bio en Valais est fortement lié au développement du marché.

 

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